Marge de manoeuvre chef d'établissement consultation du CSEE
Depuis ces derniers mois, la Cour de cassation opère un travail de clarification des règles applicables en matière de répartition et d'articulation des consultations entre le CSE central d'entreprise (CSEC) et les CSE d'établissement (CSEE). Plusieurs arrêts se sont attachés à expliciter cette répartition des compétences, dans le domaine des consultations ponctuelles, comme des consultations récurrentes. Ils ont également souligné le lien entre compétence de consultation et capacité à désigner un expert (arrêt du 9 mars 2022 ; premier arrêt du 16 février 2022 ; second arrêt du 16 février 2022).
L'arrêt du 29 juin 2022, publié par la Cour de cassation, s'inscrit dans cette construction jurisprudentielle, dans le cadre d'une consultation sur un projet de plan de reprise d'activité à la suite du confinement.
Plan de reprise d'activité à la suite du confinement
Dans cette affaire, la société Enedis élabore un plan de reprise d'activité définissant les modalités de la sortie progressive du confinement à compter du 11 mai 2020. Ce plan est présenté pour consultation au CSEC le 4 mai. La direction régionale d'un établissement (Pyrénées Landes) élabore et transmet, de son côté, aux membres de son CSEE les documents suivants : "plan de reprise des activités DR Pyrénées Landes", "prévision du taux de présence sur site DR PYL", "volume prévisionnel d'activité" et 12 "fiches réflexes".
Le CSEE demande en justice à ce que la société engage auprès de lui le processus d'information et de consultation, sous astreinte. Le comité considère que le plan de reprise d'activité élaboré par la direction régionale est une mesure d'adaptation spécifique du cadrage national relevant de la compétence du chef d'établissement. Il s'agirait, en outre, d'un aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail des agents, justifiant donc cette consultation au niveau de l'établissement.
Sa demande est rejetée. La Cour de cassation confirme la décision de la cour d'appel.
Consultation du CSEE sur un projet important modifiant les conditions de travail
La chambre sociale commence par rappeler les principes posés par le code du travail :
Exigence d'une marge de manœuvre du chef d'établissement
Puis la chambre sociale analyse les faits de l'espèce en décortiquant le plan de reprise d'activité tel que prévu au niveau central, et celui de la direction régionale :
► le plan de reprise d'activité de la société prévoit :
Enfin, la chambre sociale ajoute "qu'aucun élément ne permet d'établir que le chef d'établissement disposait d'une quelconque marge de manœuvre dans l'exercice de son pouvoir de décision quant aux modalités de la reprise de l'activité au sein de son établissement telles qu'elles avaient été arrêtées au niveau de l'entreprise".
Ainsi, il peut en être conclu que le plan de reprise d'activité de la direction régionale Pyrénées et Landes ne constitue pas une mesure d'adaptation spécifique à cet établissement du plan de reprise d'activité de la société.
Le CSEE n'a donc pas à être consulté.
L'arrêt du 29 juin 2022, publié par la Cour de cassation, s'inscrit dans cette construction jurisprudentielle, dans le cadre d'une consultation sur un projet de plan de reprise d'activité à la suite du confinement.
Plan de reprise d'activité à la suite du confinement
Dans cette affaire, la société Enedis élabore un plan de reprise d'activité définissant les modalités de la sortie progressive du confinement à compter du 11 mai 2020. Ce plan est présenté pour consultation au CSEC le 4 mai. La direction régionale d'un établissement (Pyrénées Landes) élabore et transmet, de son côté, aux membres de son CSEE les documents suivants : "plan de reprise des activités DR Pyrénées Landes", "prévision du taux de présence sur site DR PYL", "volume prévisionnel d'activité" et 12 "fiches réflexes".
Le CSEE demande en justice à ce que la société engage auprès de lui le processus d'information et de consultation, sous astreinte. Le comité considère que le plan de reprise d'activité élaboré par la direction régionale est une mesure d'adaptation spécifique du cadrage national relevant de la compétence du chef d'établissement. Il s'agirait, en outre, d'un aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail des agents, justifiant donc cette consultation au niveau de l'établissement.
Remarque : en application des article L.2316-20 et L.2316-21 du code du travail, le droit à consultation sur les mesures d'adaptations spécifiques d'un projet d'aménagement important modifiant les conditions de travail implique le droit pour le CSEE de recourir à un expert, dès lors que lesdites mesures d'adaptation spécifiques ont bien des incidences sur la santé, la sécurité ou les conditions de travail dans l'établissement (arrêt du 16 février 2022). Dans cette affaire, il n'était pas question d'expertise. |
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Sa demande est rejetée. La Cour de cassation confirme la décision de la cour d'appel.
Consultation du CSEE sur un projet important modifiant les conditions de travail
La chambre sociale commence par rappeler les principes posés par le code du travail :
- l'article L.2316-20 du code du travail prévoit que le CSE d'établissement a les mêmes attributions que le CSE d'entreprise, dans la limite des pouvoirs confiés au chef de cet établissement. Il est consulté sur les mesures d'adaptation des décisions arrêtées au niveau de l'entreprise spécifiques à l'établissement et qui relèvent de la compétence du chef de cet établissement ;
- l'article L.2312-8 du code du travail précise quant à lui que CSE est informé et consulté sur tout aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail ;
- enfin, l'article L.2316-1 prévoit que le CSE central d'entreprise est seul consulté sur les mesures d'adaptation communes à plusieurs établissements des projets importants modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail.
Exigence d'une marge de manœuvre du chef d'établissement
Puis la chambre sociale analyse les faits de l'espèce en décortiquant le plan de reprise d'activité tel que prévu au niveau central, et celui de la direction régionale :
► le plan de reprise d'activité de la société prévoit :
- premièrement, concernant le "volet sanitaire", des règles applicables en matière de santé et de sécurité communes et homogènes (déplacement, transport, prise en charge des personnes contact, salariés sur site et à distance, seuls ou en équipe),
- deuxièmement, pour les ressources humaines, un retour progressif des équipes à partir du 11 mai sur une période de quatre à six semaines, avec "en cible", le "retour physique de la moitié du collectif de travail d'ici le mois de juillet à adapter selon les contraintes d'environnement",
- troisièmement, l'énonciation du principe d'un rythme de reprise adapté avec la prise en compte du contexte local de chaque direction, et la définition d'un "cadre de cohérence national" avec la nécessité de prioriser les activités par grands métiers ;
- qu'il décline le projet de reprise d'activité de la société,
- qu'il comporte une présentation du dispositif de reprise d'activité dans l'établissement, qui rappelle les mesures sanitaires et les modalités pour assurer leur respect, ainsi qu'un "planning de retour sur les sites", dont il est indiqué qu'il se fera "conformément à la note d'orientation générale pour la relance des activités du distributeur" et qu'il sera "progressif" et tiendra compte de plusieurs paramètres dont "le cadrage national d'Enedis contenu dans le plan de reprise d'activité",
- et détaille, de plus, les modalités de reprise des activités en fonction des équipes et des métiers en indiquant les spécificités de chacun.
Enfin, la chambre sociale ajoute "qu'aucun élément ne permet d'établir que le chef d'établissement disposait d'une quelconque marge de manœuvre dans l'exercice de son pouvoir de décision quant aux modalités de la reprise de l'activité au sein de son établissement telles qu'elles avaient été arrêtées au niveau de l'entreprise".
Ainsi, il peut en être conclu que le plan de reprise d'activité de la direction régionale Pyrénées et Landes ne constitue pas une mesure d'adaptation spécifique à cet établissement du plan de reprise d'activité de la société.
Le CSEE n'a donc pas à être consulté.