Il se contente souvent de reprendre textuellement les dispositions européennes, mais il y apporte certains amendements considérés comme favorables aux travailleurs. L’accord du 2 juillet a d’ores et déjà été signé par la CFDT et la CFTC, les autres confédérations attendant la position de leurs fédérations pour y apposer leur signature.
L’approche choisie est conforme à celle retenue par les partenaires sociaux européens : elle est d’abord pédagogique. Reprenant la structure de l’accord européen et le contenu de ses dispositions, l’ANI a pour objet « d’augmenter la prise de conscience et la compréhension du stress au travail » et de fournir un cadre permettant de « détecter, de prévenir, d’éviter et de faire face aux problèmes de stress au travail » (article 2).
Ce cadre juridique s’appuie sur les règles de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs existantes, issues de la directive communautaire n° 89/391 du 12 juin 1989 et des articles L. 4121-1 à -5 du code du travail. L’accord précise les mesures à prendre ainsi que les obligations et responsabilités de chaque acteur.
1. Reconnaissance, définition et facteurs du stress au travail
1. 1. Reconnaissance.
L’ANI du 2 juillet 2008 reconnaît le stress au travail comme un risque professionnel, tout en refusant de l’appréhender comme une maladie professionnelle. Il est toutefois admis qu’« une exposition prolongée au stress peut (…) causer des problèmes de santé » (article 3 alinéa 2).
Les partenaires sociaux s’attachent cependant à distinguer le stress au travail du harcèlement et de la violence au travail, qui sont envisagés comme des facteurs de stress. Ils s’engagent à entamer une négociation sur ces deux thèmes dans les 12 mois suivant la signature de l’accord, afin de transposer en droit français un autre accord-cadre européen conclu le 26 avril 2007.
1. 2. Définition.
L’un des intérêts de l’accord réside dans la définition qu’il retient du stress. Les partenaires sociaux français reprennent la définition de l’Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail, selon laquelle « un état de stress survient lorsqu’il y a déséquilibre entre la perception qu’une personne a des contraintes que lui impose son environnement et la perception qu’elle a de ses propres ressources pour y faire face » (article 3 alinéa 1er). Le texte français s’écarte ainsi de l’accord-cadre européen, qui définit les stress comme « un état accompagné de plaintes ou dysfonctionnements physiques, psychologiques ou sociaux, et qui résulte du fait que les individus se sentent inaptes à combler un écart avec les exigences ou les attentes les concernant. »
La mention, figurant dans l’accord européen, de la « pression à court terme qui peut être considérée comme positive » a finalement été supprimée dans le texte final. Celui-ci affirme tout de même que « l’individu est capable de gérer la pression à court terme », mais précise qu’« il éprouve de grandes difficultés face à une exposition prolongée ou répétée à des pressions intenses ».
Cette description du stress a été obtenue par les syndicats, qui sont parvenus à imposer une définition insistant sur le lien entre stress et management. Ne subsiste dans l’accord que l’affirmation selon laquelle « différents individus peuvent réagir de manière différente à des situations similaires et un même individu peut, à différents moments de sa vie, réagir différemment à des situations similaires ».
La dimension collective du stress lié au travail est donc fortement privilégiée. Cela est confirmé s’agissant des facteurs de stress identifiés par l’accord.
1. 3. Facteurs (article 4).
Reconnaissant la complexité du phénomène du stress, les partenaires sociaux identifient les « facteurs » pouvant constituer « des signes révélant un problème de stress au travail ». Dans son approche globale, l’accord français fait de l’analyse des facteurs de stress une obligation, alors que l’accord-cadre européen prévoit que « l’identification d’un problème de stress au travail peut passer par une analyse de facteurs (…) ».
L’ANI est, par ailleurs, plus détaillé s’agissant de l’énumération des quatre catégories de facteurs figurant dans l’accord européen :
- A ce titre, l’accord français renforce l’accent mis par l’accord européen sur l’importance de l’organisation du travail, premier facteur du stress au travail qui comprend : « aménagement du temps de travail, dépassements excessifs et systématiques d’horaires, degré d’autonomie, mauvaise adéquation du travail à la capacité ou aux moyens mis à disposition des travailleurs, charge de travail réelle manifestement excessive, des objectifs disproportionnés ou mal définis, une mise sous pression systématique qui ne doit pas constituer un mode de management, etc. » (article 4 alinéa 1er).
- Les « conditions et l’environnement de travail » (exposition à un environnement agressif, à un comportement abusif, au bruit, à une promiscuité trop importante, à la chaleur, à des substances dangereuses, etc.) favorisent également le stress. L’accord admet ainsi que l’exposition à ces risques peut donc non seulement affecter la santé physique du travailleur, mais également sa santé mentale, ces deux aspects étant étroitement liés en matière de stress.
- Les partenaires sociaux français reconnaissent encore que la (mauvaise) communication peut engendrer un stress, en créant une incertitude et des difficultés relationnelles.
- Enfin, les facteurs subjectifs ne sont pas oubliés ; l’accord cite les « pressions émotionnelles et sociales, impression de ne pouvoir faire face à la situation, perception d’un manque de soutien, difficulté de conciliation entre vie personnelle et professionnelle, etc. ». Ce dernier facteur est appréhendé de manière plus générale dans l’accord, son article 2 précisant que l’équilibre entre vie professionnelle, vie familiale, vie personnelle concourt à la préservation de la santé des salariés face au stress et doit donc être prise en compte dans la prévention du stress au travail.
L’approche choisie est conforme à celle retenue par les partenaires sociaux européens : elle est d’abord pédagogique. Reprenant la structure de l’accord européen et le contenu de ses dispositions, l’ANI a pour objet « d’augmenter la prise de conscience et la compréhension du stress au travail » et de fournir un cadre permettant de « détecter, de prévenir, d’éviter et de faire face aux problèmes de stress au travail » (article 2).
Ce cadre juridique s’appuie sur les règles de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs existantes, issues de la directive communautaire n° 89/391 du 12 juin 1989 et des articles L. 4121-1 à -5 du code du travail. L’accord précise les mesures à prendre ainsi que les obligations et responsabilités de chaque acteur.
1. Reconnaissance, définition et facteurs du stress au travail
1. 1. Reconnaissance.
L’ANI du 2 juillet 2008 reconnaît le stress au travail comme un risque professionnel, tout en refusant de l’appréhender comme une maladie professionnelle. Il est toutefois admis qu’« une exposition prolongée au stress peut (…) causer des problèmes de santé » (article 3 alinéa 2).
Les partenaires sociaux s’attachent cependant à distinguer le stress au travail du harcèlement et de la violence au travail, qui sont envisagés comme des facteurs de stress. Ils s’engagent à entamer une négociation sur ces deux thèmes dans les 12 mois suivant la signature de l’accord, afin de transposer en droit français un autre accord-cadre européen conclu le 26 avril 2007.
1. 2. Définition.
L’un des intérêts de l’accord réside dans la définition qu’il retient du stress. Les partenaires sociaux français reprennent la définition de l’Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail, selon laquelle « un état de stress survient lorsqu’il y a déséquilibre entre la perception qu’une personne a des contraintes que lui impose son environnement et la perception qu’elle a de ses propres ressources pour y faire face » (article 3 alinéa 1er). Le texte français s’écarte ainsi de l’accord-cadre européen, qui définit les stress comme « un état accompagné de plaintes ou dysfonctionnements physiques, psychologiques ou sociaux, et qui résulte du fait que les individus se sentent inaptes à combler un écart avec les exigences ou les attentes les concernant. »
La mention, figurant dans l’accord européen, de la « pression à court terme qui peut être considérée comme positive » a finalement été supprimée dans le texte final. Celui-ci affirme tout de même que « l’individu est capable de gérer la pression à court terme », mais précise qu’« il éprouve de grandes difficultés face à une exposition prolongée ou répétée à des pressions intenses ».
Cette description du stress a été obtenue par les syndicats, qui sont parvenus à imposer une définition insistant sur le lien entre stress et management. Ne subsiste dans l’accord que l’affirmation selon laquelle « différents individus peuvent réagir de manière différente à des situations similaires et un même individu peut, à différents moments de sa vie, réagir différemment à des situations similaires ».
La dimension collective du stress lié au travail est donc fortement privilégiée. Cela est confirmé s’agissant des facteurs de stress identifiés par l’accord.
1. 3. Facteurs (article 4).
Reconnaissant la complexité du phénomène du stress, les partenaires sociaux identifient les « facteurs » pouvant constituer « des signes révélant un problème de stress au travail ». Dans son approche globale, l’accord français fait de l’analyse des facteurs de stress une obligation, alors que l’accord-cadre européen prévoit que « l’identification d’un problème de stress au travail peut passer par une analyse de facteurs (…) ».
L’ANI est, par ailleurs, plus détaillé s’agissant de l’énumération des quatre catégories de facteurs figurant dans l’accord européen :
- A ce titre, l’accord français renforce l’accent mis par l’accord européen sur l’importance de l’organisation du travail, premier facteur du stress au travail qui comprend : « aménagement du temps de travail, dépassements excessifs et systématiques d’horaires, degré d’autonomie, mauvaise adéquation du travail à la capacité ou aux moyens mis à disposition des travailleurs, charge de travail réelle manifestement excessive, des objectifs disproportionnés ou mal définis, une mise sous pression systématique qui ne doit pas constituer un mode de management, etc. » (article 4 alinéa 1er).
- Les « conditions et l’environnement de travail » (exposition à un environnement agressif, à un comportement abusif, au bruit, à une promiscuité trop importante, à la chaleur, à des substances dangereuses, etc.) favorisent également le stress. L’accord admet ainsi que l’exposition à ces risques peut donc non seulement affecter la santé physique du travailleur, mais également sa santé mentale, ces deux aspects étant étroitement liés en matière de stress.
- Les partenaires sociaux français reconnaissent encore que la (mauvaise) communication peut engendrer un stress, en créant une incertitude et des difficultés relationnelles.
- Enfin, les facteurs subjectifs ne sont pas oubliés ; l’accord cite les « pressions émotionnelles et sociales, impression de ne pouvoir faire face à la situation, perception d’un manque de soutien, difficulté de conciliation entre vie personnelle et professionnelle, etc. ». Ce dernier facteur est appréhendé de manière plus générale dans l’accord, son article 2 précisant que l’équilibre entre vie professionnelle, vie familiale, vie personnelle concourt à la préservation de la santé des salariés face au stress et doit donc être prise en compte dans la prévention du stress au travail.
2. Mesures et responsabilités face au stress au travail
« Dès qu’un problème de stress au travail est identifié, une action doit être entreprise pour le prévenir, l’éliminer ou à défaut le réduire » (article 4 alinéa 4). Si « la responsabilité de déterminer les mesures appropriées incombe à l’employeur » (ibid.), l’ensemble des acteurs de l’entreprise est associé à leur mise en oeuvre.
Conformément à l’accord européen, les partenaires sociaux français ont pris soin de préciser que l’obligation des employeurs d’assurer la sécurité et de protéger la santé physique et mentale des travailleurs « couvre également les problèmes de stress au travail dans la mesure où ils présentent un risquent pour la santé et la sécurité ». Par conséquent, le régime juridique mis en place par l’accord est calqué sur les règles instituées aux articles L. 4121-1 à -5 du nouveau code du travail transposant la directive européenne sur la santé-sécurité des travailleurs.
2. 1. Les mesures de lutte contre le stress au travail
Différents types. De manière quelque peu maladroite, l’accord précise tout d’abord que « les mesures peuvent être collectives, individuelles ou concomitantes » (article 6 alinéa 1er), sans privilégier l’un ou l’autre type. Cette disposition, qui se conforme à l’accord européen, apparaît pourtant contraire à la directive 89/391. Celle-ci impose en effet à l’employeur de « prendre des mesures de protection collective par priorité à des mesures de protection individuelle » (article 6 § 2 sous h).
Par ailleurs, l’accord laisse le choix aux employeurs entre des « mesures spécifiques visant les facteurs de stress identifiés » ou « une politique générale intégrée qui implique des actions de prévention et des actions correctives » (article 6 alinéa 1er). Cette seconde approche est conforme à la directive communautaire, qui impose notamment à l’employeur de « planifier la prévention en visant un ensemble cohérent qui intègre dans la prévention la technique, l’organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l’influence des facteurs ambiants au travail » (article 6 § 2 sous g).
Finalité des mesures. Les mesures doivent donc tendre à prévenir tout phénomène de stress, ainsi qu’à l’éliminer ou à défaut le réduire. L’accent est toutefois mis sur le principe de prévention à plusieurs reprises. Ainsi, l’accord précise que « la préservation de la santé des travailleurs » passe notamment par « la mise en place d’une prévention efficace contre les problèmes générés par les facteurs de stress liés au travail » (article 2 alinéa 2), et que « l’amélioration de la prévention du stress est un facteur positif qui contribue à une meilleure santé des travailleurs et à une plus grande efficacité de l’entreprise » (article 4 alinéa 5).
Exemples. Les partenaires sociaux français souhaitent que cet accord permette la promotion de bonnes pratiques notamment de dialogue dans l’entreprise et dans les modes organisationnels pour faire face au stress au travail (article 2 alinéa 2). Ils ont repris, à titre d’exemple, les mesures citées à cette fin par l’accord européen.
Les premiers exemples ne font qu’indiquer l’objet des mesures en se référant implicitement aux facteurs de stress identifiés plus haut : « des mesures visant à améliorer l’organisation, les processus, les conditions et l’environnement de travail, à assurer un soutien adéquat de la direction aux personnes et aux équipes, à donner à tous les acteurs de l’entreprise des possibilités d’échanger à propos de leur travail, à assurer une bonne adéquation entre responsabilité et contrôle sur le travail, et des mesures de gestion et de communication visant à clarifier les objectifs de l’entreprise et le rôle de chaque travailleur ».
L’accord insiste ensuite sur l’importance de « la formation de l’ensemble des acteurs de l’entreprise et en particulier de l’encadrement et de la direction », ainsi que sur « l’information et la consultation des travailleurs et/ou de leurs représentants, conformément à la législation, aux conventions collectives et aux pratiques européennes et nationales ». La mention des pratiques européennes est surprenante et ne s’explique que par la reprise in extenso de la disposition correspondante de l’accord européen.
Citées à titre d’exemple, ces mesures de formation et d’information sont en réalité rendues obligatoires tant par le code du travail que par la directive européenne.
L’ANI comporte également une obligation de réexamen régulier des mesures de lutte contre le stress, calquée sur celle imposée par l’accord européen.
2. 2 Les responsabilités et l’implication des différents acteurs
Obligations réciproques de l’employeur et des travailleurs, responsabilités partagées ? L’article 5 de l’ANI, intitulé « Responsabilités des employeurs et de salariés », étend au problème du stress au travail la législation définissant les obligations de chacun en matière de santé et de sécurité des travailleurs. L’obligation générale de l’employeur de protéger la santé et la sécurité des travailleurs, ainsi que l’obligation des travailleurs de se conformer aux mesures de protection déterminées par l’employeur sont expressément réaffirmées, à l’image des dispositions de l’accord européen (article 5).
« La responsabilité de déterminer les mesures appropriées incombe à l’employeur », les institutions représentatives du personnel, et à défaut les travailleurs, n’étant associés qu’à la mise en oeuvre de ces mesures (article 4 alinéa 4). L’ANI – mais non l’accord européen – prend soin de le rappeler plus loin : « les mesures sont mises en oeuvre, sous la responsabilité de l’employeur, avec la participation et la collaboration des travailleurs et/ou de leurs représentants » (article 5 alinéa 3).
Cette dernière disposition, « purement » française, est importante car elle réaffirme le principe de la responsabilité de l’employeur dans la mise en oeuvre des mesures. L’accord européen se contente en effet d’une seule disposition selon laquelle « ces mesures seront mises en oeuvre avec la participation et la collaboration des travailleurs et/ou de leurs représentants ».
Cette différence, lourde de sens, est au coeur d’un arrêt de la Cour de justice du 5 janvier 2008, par lequel la Cour de justice des Communautés européennes a condamné la France pour ne pas avoir transposé les obligations spécifiques incombant aux travailleurs selon la directive, suggérant que l’employeur et les travailleurs se partagent la responsabilité dans la gestion des risques. Il est donc permis de douter de la conformité de l’ANI à la directive.
La question se pose également concernant l’accord européen lui-même : en tant qu’accord « autonome », il n’a pas fait l’objet d’un examen de sa conformité au droit communautaire, la Commission n’ayant inauguré ce contrôle qu’en 2007 en examinant les dispositions de l’accord autonome sur le harcèlement et la violence au travail. Une éventuelle contestation de l’accord français, voire de l’arrêté d’extension à venir, devrait logiquement rejaillir sur l’accord européen, dont il constitue le prolongement, et sur la conformité de ce dernier à la directive communautaire.
L’implication des autres acteurs : le CHSCT et le médecin du travail
L’accord du 2 juillet prend soin de préserver le rôle du CHSCT dans la prévention et la lutte contre le stress, en précisant que « lorsque l’entreprise ne dispose pas de l’expertise requise, elle fait appel à une expertise externe conformément aux législations, aux conventions collectives et aux pratiques européennes et nationales, sans obérer le rôle du CHSCT ».
Cette disposition renvoie implicitement à un arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes (22 mai 2003, Commission c/ Pays-Bas), qui impose la priorité de l’intervention interne sur celle des experts externes.
Si le rôle des représentants du personnel dans la mise en oeuvre de mesures de lutte contre le stress est rappelé à plusieurs reprises, le droit spécifique à la formation des représentants du personnel sur la question des risques psychosociaux, revendiqué par la CFDT, n’a pas été consacré. Selon ce syndicat, le refus patronal s’expliquerait par la volonté des employeurs de se garder une marge de manoeuvre quant aux négociations à venir sur le rôle du CHSCT ou encore sur le droit d’alerte en matière de stress et de troubles musculo-squelettiques.
Quant au médecin du travail, il est considéré comme « une ressource en termes d’identification du stress au travail ». Son implication relève de l’évidence au regard de son rôle de prévention (cf. article L. 4622-3 C. tr., L. 241-2 al. 1er ancien). Par ailleurs, « les partenaires sociaux souhaitent réaffirmer (son) rôle pivot » et précisent que le secret médical « garantit au travailleur de préserver son anonymat, dans un environnement pluridisciplinaire » (article 6 alinéa 2).
Ces dispositions ont été ajoutées par les partenaires sociaux français. Sans doute faut-il y voir un lien avec la réforme annoncée des services de santé au travail et du rôle du médecin du travail qui suscite de vives interrogations de la part des organisations syndicales.
3. Les suites de l’accord
L’accord « invite l’État à prendre, dans les meilleurs délais, les mesures d’extension » afin qu’il s’applique à toutes les entreprises. Mais la généralité des principes consacrés et des termes employés nécessite une mise en oeuvre concrète afin que l’accord soit réellement opérationnel. L’obligation d’engager des négociations de branche afin de d’adapter l’ANI aux spécificités des activités a été rejetée par le Medef au nom du principe d’autonomie des branches. L’accord du 2 juillet 2008 n’impose donc pas une négociation décentralisée. Il précise néanmoins que les accords de branche et d’entreprises ne peuvent déroger à ses dispositions que dans un sens plus favorable aux travailleurs (article 7 alinéa 2).
Citant l’exemple de l’utilisation abusive des TIC (téléphone et ordinateurs portables…), la CFTC a demandé à ses fédérations d’ouvrir au plus vite des négociations en la matière.
Il faudra donc patienter avant de pouvoir mesurer l’impact concret de l’accord dans les entreprises.
« Dès qu’un problème de stress au travail est identifié, une action doit être entreprise pour le prévenir, l’éliminer ou à défaut le réduire » (article 4 alinéa 4). Si « la responsabilité de déterminer les mesures appropriées incombe à l’employeur » (ibid.), l’ensemble des acteurs de l’entreprise est associé à leur mise en oeuvre.
Conformément à l’accord européen, les partenaires sociaux français ont pris soin de préciser que l’obligation des employeurs d’assurer la sécurité et de protéger la santé physique et mentale des travailleurs « couvre également les problèmes de stress au travail dans la mesure où ils présentent un risquent pour la santé et la sécurité ». Par conséquent, le régime juridique mis en place par l’accord est calqué sur les règles instituées aux articles L. 4121-1 à -5 du nouveau code du travail transposant la directive européenne sur la santé-sécurité des travailleurs.
2. 1. Les mesures de lutte contre le stress au travail
Différents types. De manière quelque peu maladroite, l’accord précise tout d’abord que « les mesures peuvent être collectives, individuelles ou concomitantes » (article 6 alinéa 1er), sans privilégier l’un ou l’autre type. Cette disposition, qui se conforme à l’accord européen, apparaît pourtant contraire à la directive 89/391. Celle-ci impose en effet à l’employeur de « prendre des mesures de protection collective par priorité à des mesures de protection individuelle » (article 6 § 2 sous h).
Par ailleurs, l’accord laisse le choix aux employeurs entre des « mesures spécifiques visant les facteurs de stress identifiés » ou « une politique générale intégrée qui implique des actions de prévention et des actions correctives » (article 6 alinéa 1er). Cette seconde approche est conforme à la directive communautaire, qui impose notamment à l’employeur de « planifier la prévention en visant un ensemble cohérent qui intègre dans la prévention la technique, l’organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l’influence des facteurs ambiants au travail » (article 6 § 2 sous g).
Finalité des mesures. Les mesures doivent donc tendre à prévenir tout phénomène de stress, ainsi qu’à l’éliminer ou à défaut le réduire. L’accent est toutefois mis sur le principe de prévention à plusieurs reprises. Ainsi, l’accord précise que « la préservation de la santé des travailleurs » passe notamment par « la mise en place d’une prévention efficace contre les problèmes générés par les facteurs de stress liés au travail » (article 2 alinéa 2), et que « l’amélioration de la prévention du stress est un facteur positif qui contribue à une meilleure santé des travailleurs et à une plus grande efficacité de l’entreprise » (article 4 alinéa 5).
Exemples. Les partenaires sociaux français souhaitent que cet accord permette la promotion de bonnes pratiques notamment de dialogue dans l’entreprise et dans les modes organisationnels pour faire face au stress au travail (article 2 alinéa 2). Ils ont repris, à titre d’exemple, les mesures citées à cette fin par l’accord européen.
Les premiers exemples ne font qu’indiquer l’objet des mesures en se référant implicitement aux facteurs de stress identifiés plus haut : « des mesures visant à améliorer l’organisation, les processus, les conditions et l’environnement de travail, à assurer un soutien adéquat de la direction aux personnes et aux équipes, à donner à tous les acteurs de l’entreprise des possibilités d’échanger à propos de leur travail, à assurer une bonne adéquation entre responsabilité et contrôle sur le travail, et des mesures de gestion et de communication visant à clarifier les objectifs de l’entreprise et le rôle de chaque travailleur ».
L’accord insiste ensuite sur l’importance de « la formation de l’ensemble des acteurs de l’entreprise et en particulier de l’encadrement et de la direction », ainsi que sur « l’information et la consultation des travailleurs et/ou de leurs représentants, conformément à la législation, aux conventions collectives et aux pratiques européennes et nationales ». La mention des pratiques européennes est surprenante et ne s’explique que par la reprise in extenso de la disposition correspondante de l’accord européen.
Citées à titre d’exemple, ces mesures de formation et d’information sont en réalité rendues obligatoires tant par le code du travail que par la directive européenne.
L’ANI comporte également une obligation de réexamen régulier des mesures de lutte contre le stress, calquée sur celle imposée par l’accord européen.
2. 2 Les responsabilités et l’implication des différents acteurs
Obligations réciproques de l’employeur et des travailleurs, responsabilités partagées ? L’article 5 de l’ANI, intitulé « Responsabilités des employeurs et de salariés », étend au problème du stress au travail la législation définissant les obligations de chacun en matière de santé et de sécurité des travailleurs. L’obligation générale de l’employeur de protéger la santé et la sécurité des travailleurs, ainsi que l’obligation des travailleurs de se conformer aux mesures de protection déterminées par l’employeur sont expressément réaffirmées, à l’image des dispositions de l’accord européen (article 5).
« La responsabilité de déterminer les mesures appropriées incombe à l’employeur », les institutions représentatives du personnel, et à défaut les travailleurs, n’étant associés qu’à la mise en oeuvre de ces mesures (article 4 alinéa 4). L’ANI – mais non l’accord européen – prend soin de le rappeler plus loin : « les mesures sont mises en oeuvre, sous la responsabilité de l’employeur, avec la participation et la collaboration des travailleurs et/ou de leurs représentants » (article 5 alinéa 3).
Cette dernière disposition, « purement » française, est importante car elle réaffirme le principe de la responsabilité de l’employeur dans la mise en oeuvre des mesures. L’accord européen se contente en effet d’une seule disposition selon laquelle « ces mesures seront mises en oeuvre avec la participation et la collaboration des travailleurs et/ou de leurs représentants ».
Cette différence, lourde de sens, est au coeur d’un arrêt de la Cour de justice du 5 janvier 2008, par lequel la Cour de justice des Communautés européennes a condamné la France pour ne pas avoir transposé les obligations spécifiques incombant aux travailleurs selon la directive, suggérant que l’employeur et les travailleurs se partagent la responsabilité dans la gestion des risques. Il est donc permis de douter de la conformité de l’ANI à la directive.
La question se pose également concernant l’accord européen lui-même : en tant qu’accord « autonome », il n’a pas fait l’objet d’un examen de sa conformité au droit communautaire, la Commission n’ayant inauguré ce contrôle qu’en 2007 en examinant les dispositions de l’accord autonome sur le harcèlement et la violence au travail. Une éventuelle contestation de l’accord français, voire de l’arrêté d’extension à venir, devrait logiquement rejaillir sur l’accord européen, dont il constitue le prolongement, et sur la conformité de ce dernier à la directive communautaire.
L’implication des autres acteurs : le CHSCT et le médecin du travail
L’accord du 2 juillet prend soin de préserver le rôle du CHSCT dans la prévention et la lutte contre le stress, en précisant que « lorsque l’entreprise ne dispose pas de l’expertise requise, elle fait appel à une expertise externe conformément aux législations, aux conventions collectives et aux pratiques européennes et nationales, sans obérer le rôle du CHSCT ».
Cette disposition renvoie implicitement à un arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes (22 mai 2003, Commission c/ Pays-Bas), qui impose la priorité de l’intervention interne sur celle des experts externes.
Si le rôle des représentants du personnel dans la mise en oeuvre de mesures de lutte contre le stress est rappelé à plusieurs reprises, le droit spécifique à la formation des représentants du personnel sur la question des risques psychosociaux, revendiqué par la CFDT, n’a pas été consacré. Selon ce syndicat, le refus patronal s’expliquerait par la volonté des employeurs de se garder une marge de manoeuvre quant aux négociations à venir sur le rôle du CHSCT ou encore sur le droit d’alerte en matière de stress et de troubles musculo-squelettiques.
Quant au médecin du travail, il est considéré comme « une ressource en termes d’identification du stress au travail ». Son implication relève de l’évidence au regard de son rôle de prévention (cf. article L. 4622-3 C. tr., L. 241-2 al. 1er ancien). Par ailleurs, « les partenaires sociaux souhaitent réaffirmer (son) rôle pivot » et précisent que le secret médical « garantit au travailleur de préserver son anonymat, dans un environnement pluridisciplinaire » (article 6 alinéa 2).
Ces dispositions ont été ajoutées par les partenaires sociaux français. Sans doute faut-il y voir un lien avec la réforme annoncée des services de santé au travail et du rôle du médecin du travail qui suscite de vives interrogations de la part des organisations syndicales.
3. Les suites de l’accord
L’accord « invite l’État à prendre, dans les meilleurs délais, les mesures d’extension » afin qu’il s’applique à toutes les entreprises. Mais la généralité des principes consacrés et des termes employés nécessite une mise en oeuvre concrète afin que l’accord soit réellement opérationnel. L’obligation d’engager des négociations de branche afin de d’adapter l’ANI aux spécificités des activités a été rejetée par le Medef au nom du principe d’autonomie des branches. L’accord du 2 juillet 2008 n’impose donc pas une négociation décentralisée. Il précise néanmoins que les accords de branche et d’entreprises ne peuvent déroger à ses dispositions que dans un sens plus favorable aux travailleurs (article 7 alinéa 2).
Citant l’exemple de l’utilisation abusive des TIC (téléphone et ordinateurs portables…), la CFTC a demandé à ses fédérations d’ouvrir au plus vite des négociations en la matière.
Il faudra donc patienter avant de pouvoir mesurer l’impact concret de l’accord dans les entreprises.