Salarié protégé : pas de reclassement sur des postes intérim très courts
L'employeur qui envisage de licencier pour inaptitude un salarié protégé doit effectuer une recherche sérieuse de reclassement dans des postes disponibles, quelle que soit la durée des contrats, et appropriés à ses capacités. Cependant des contrats d'intérim très courts, de deux à trois jours, afin de pallier des absences ponctuelles de salariés ou de faire face à des pointes saisonnières d'activité et présentant un caractère aléatoire ne constituent pas de tels "postes disponibles".
En cas de licenciement d’un salarié protégé pour inaptitude, les règles protectrices instituées en faveur des représentants du personnel se combinent avec les dispositions des articles L.1226-2 et L.1226-10 du code du travail prévoyant le reclassement du salarié devenu inapte à son emploi. Parmi les points vérifiés par l’administration en cas de demande d’autorisation de licenciement, le contrôle de ces efforts de reclassement.
La jurisprudence de la Cour de cassation concernant le reclassement des salariés non-protégés est très abondante et est en général transposable aux salariés protégés. Mais c’est le juge administratif qui est compétent concernant les salariés protégés.
Dans cette décision du 19 juillet 2022, le Conseil d’Etat transpose la jurisprudence de la Cour de cassation, et apporte une précision inédite en matière de reclassement sur un poste temporaire.
Reclassement sur un poste disponible, quelle que soit la durée du contrat
Dans cette affaire, un salarié protégé conteste la décision de l’administration d’autoriser son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement. Pour lui, l’entreprise aurait dû lui proposer les postes pourvus par des contrats d’intérim. L’employeur n’aurait donc pas respecté son obligation de reclassement. Le salarié est débouté par la cour administrative d'appel.
Le Conseil d’Etat confirme l’arrêt d’appel. Il commence par rappeler l’obligation pour l’administration de s’assurer que l’employeur a, conformément aux dispositions de l’article L.1226-10 du code du travail, cherché sérieusement à reclasser le salarié sur d’autres postes appropriés à ses capacités, le licenciement ne pouvant être autorisé à défaut.
Puis le Conseil d’Etat ajoute que cette recherche sérieuse des postes disponibles doit être effectuée "quelle que soit la durée des contrats susceptibles d’être proposés pour pourvoir ces postes".
Ainsi, "dans l’hypothèse où l’employeur recourt au travail temporaire dans des conditions telles qu'elles révèlent l’existence d’un ou plusieurs postes disponibles dans l’entreprise, peu important qu’ils soient susceptibles de fait l’objet de contrats à durée indéterminée ou déterminée, il lui appartient de proposer ces postes au salarié, pour autant qu'ils soient appropriés à ses capacités".
► C’est la première fois que le Conseil d’Etat se prononce expressément sur ce point et confirme que peuvent être proposés comme postes de reclassement aux salariés protégés inaptes des contrats à durée déterminée, dont des contrats d’intérim. Un arrêt ancien le sous-entendait cependant (Conseil d'Etat, 11 juin 1990), et l’administration l’avait admis en se fondant sur les décisions de la Cour de cassation (Guide DGT (salariés protégés) 20 septembre 2019, fiche 9). Le Conseil d’État adopte ainsi cette jurisprudence de la Cour de cassation en matière de reclassement des salariés "ordinaires" inaptes (par exemple, arrêt du 5 mars 2014 ; arrêt du 4 septembre 2019. A noter que, récemment le Conseil d’Etat s’est prononcé en ce sens concernant le reclassement dans le cadre d’un plan de sauvegarde de l’emploi. Il a précisé que l’employeur doit identifier tous les emplois disponibles pour un reclassement interne, et ce quelle que soit la durée des contrats de travail susceptibles d’être proposés pour y pourvoir (Conseil d'Etat, 22 juillet 2021).
Exclusion des contrats très courts et aléatoires
Cependant, le Conseil d’Etat considère que les postes en cause dans cette affaire ne répondent pas aux conditions nécessaires pour être qualifiés de postes de reclassement.
En effet, il s’agit de contrats d’intérim "conclus pour des durées très courtes, de deux à trois jours, afin de pallier des absences ponctuelles de salariés ou de faire face à des pointes saisonnières d’activité et présentant un caractère aléatoire".
Ainsi, de telles modalités du recours au travail temporaire ne constituent pas "des postes disponibles" qui auraient dû être proposés au salarié protégé en vue de son reclassement. L’employeur n’a donc pas manqué à son obligation de reclassement sérieux, en ne proposant pas ces postes au salarié.
► Dans les arrêts de la Cour de cassation précisant que le reclassement sur un poste disponible devait être proposé quelle que soit la durée du contrat, il s’agissait de postes en CDD de quelques mois. A notre connaissance, la Cour de cassation ne s’est pas prononcée sur des postes de remplacement de quelques jours comme dans cette affaire. Alors quelle est la limite ? Le critère du "poste disponible" semble être le critère déterminant. Et le Conseil d’État qualifie des contrats très courts et aléatoires comme n’étant pas de tels "postes disponibles". Reste pour le Conseil d’État, ou la Cour de cassation à apporter des éclaircissements à ce sujet
En cas de licenciement d’un salarié protégé pour inaptitude, les règles protectrices instituées en faveur des représentants du personnel se combinent avec les dispositions des articles L.1226-2 et L.1226-10 du code du travail prévoyant le reclassement du salarié devenu inapte à son emploi. Parmi les points vérifiés par l’administration en cas de demande d’autorisation de licenciement, le contrôle de ces efforts de reclassement.
La jurisprudence de la Cour de cassation concernant le reclassement des salariés non-protégés est très abondante et est en général transposable aux salariés protégés. Mais c’est le juge administratif qui est compétent concernant les salariés protégés.
Dans cette décision du 19 juillet 2022, le Conseil d’Etat transpose la jurisprudence de la Cour de cassation, et apporte une précision inédite en matière de reclassement sur un poste temporaire.
Reclassement sur un poste disponible, quelle que soit la durée du contrat
Dans cette affaire, un salarié protégé conteste la décision de l’administration d’autoriser son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement. Pour lui, l’entreprise aurait dû lui proposer les postes pourvus par des contrats d’intérim. L’employeur n’aurait donc pas respecté son obligation de reclassement. Le salarié est débouté par la cour administrative d'appel.
Le Conseil d’Etat confirme l’arrêt d’appel. Il commence par rappeler l’obligation pour l’administration de s’assurer que l’employeur a, conformément aux dispositions de l’article L.1226-10 du code du travail, cherché sérieusement à reclasser le salarié sur d’autres postes appropriés à ses capacités, le licenciement ne pouvant être autorisé à défaut.
Puis le Conseil d’Etat ajoute que cette recherche sérieuse des postes disponibles doit être effectuée "quelle que soit la durée des contrats susceptibles d’être proposés pour pourvoir ces postes".
Ainsi, "dans l’hypothèse où l’employeur recourt au travail temporaire dans des conditions telles qu'elles révèlent l’existence d’un ou plusieurs postes disponibles dans l’entreprise, peu important qu’ils soient susceptibles de fait l’objet de contrats à durée indéterminée ou déterminée, il lui appartient de proposer ces postes au salarié, pour autant qu'ils soient appropriés à ses capacités".
► C’est la première fois que le Conseil d’Etat se prononce expressément sur ce point et confirme que peuvent être proposés comme postes de reclassement aux salariés protégés inaptes des contrats à durée déterminée, dont des contrats d’intérim. Un arrêt ancien le sous-entendait cependant (Conseil d'Etat, 11 juin 1990), et l’administration l’avait admis en se fondant sur les décisions de la Cour de cassation (Guide DGT (salariés protégés) 20 septembre 2019, fiche 9). Le Conseil d’État adopte ainsi cette jurisprudence de la Cour de cassation en matière de reclassement des salariés "ordinaires" inaptes (par exemple, arrêt du 5 mars 2014 ; arrêt du 4 septembre 2019. A noter que, récemment le Conseil d’Etat s’est prononcé en ce sens concernant le reclassement dans le cadre d’un plan de sauvegarde de l’emploi. Il a précisé que l’employeur doit identifier tous les emplois disponibles pour un reclassement interne, et ce quelle que soit la durée des contrats de travail susceptibles d’être proposés pour y pourvoir (Conseil d'Etat, 22 juillet 2021).
Exclusion des contrats très courts et aléatoires
Cependant, le Conseil d’Etat considère que les postes en cause dans cette affaire ne répondent pas aux conditions nécessaires pour être qualifiés de postes de reclassement.
En effet, il s’agit de contrats d’intérim "conclus pour des durées très courtes, de deux à trois jours, afin de pallier des absences ponctuelles de salariés ou de faire face à des pointes saisonnières d’activité et présentant un caractère aléatoire".
Ainsi, de telles modalités du recours au travail temporaire ne constituent pas "des postes disponibles" qui auraient dû être proposés au salarié protégé en vue de son reclassement. L’employeur n’a donc pas manqué à son obligation de reclassement sérieux, en ne proposant pas ces postes au salarié.
► Dans les arrêts de la Cour de cassation précisant que le reclassement sur un poste disponible devait être proposé quelle que soit la durée du contrat, il s’agissait de postes en CDD de quelques mois. A notre connaissance, la Cour de cassation ne s’est pas prononcée sur des postes de remplacement de quelques jours comme dans cette affaire. Alors quelle est la limite ? Le critère du "poste disponible" semble être le critère déterminant. Et le Conseil d’État qualifie des contrats très courts et aléatoires comme n’étant pas de tels "postes disponibles". Reste pour le Conseil d’État, ou la Cour de cassation à apporter des éclaircissements à ce sujet